Quand un chroniqueur gastronomique et blogueur se met en cuisine, cela donne parfois un très beau résultat comme Table de Bruno Verjus (Food Intelligence).Cuisine du marché, bistronomique, de grande qualité, haute en couleurs et saveurs, une cuisine de coeur, intuitive comme j'aime et partagée avec Marie-Pierre (Very easy kitchen) pour son anniversaire. Au menu, produits de saison et quelques raretés, beaucoup de sourire en cuisine (celle-ci est ouverte et quand on glisse un oeil, c'est un ballet bien orchestré auquel on assiste). L'on assiste même au baptême de Table pour une toute jeune fille, charmante, qui y fera la saison. Et Bruno Verjus nous offre le Champagne pour fêter les (bip) ans de ma comparse. Excellent moment en belle compagnie autour de mets aux cuissons précises et à l'habillage poétique, cuisine d'émotion, vins ad hoc.
Asperges blanches d'Anjou, pochées au bouillon, crème de parmesan, jaune d'oeuf osmosé à l'eau de mer, huile d'orange, tuber aestivum. La truffe d'été (je m'en suis rendue compte à mon retour en Vaucluse) est peu expressive cette année. Mais l'ensemble est d'une belle harmonie.
Girolles, sautées au beurre cru de vache Rouge des Flandres, émulsion de crème de parmesan, burrata, huile d'épines de pin Douglas, oxalis. Sublimes produits, rares, fondantes girolles, charnues, beaucoup de plaisir.
Du maccabeu pour arroser nos entrées, du négociant Vinoceros, fruité blanc/jaune, pointe oxydative et un peu saline, bon accord avec les asperges blanches comme les champignons.
Thon rouge Atlantique de Saint Jean de Luz pêché à la canne, en tartare, vinaigre de riz infusé de piment Sambal Oelek, écrasée de cassis. Le thon rouge est désormais un mets tellement rare qu'il se déguste (une fois par an en moyenne me concernant). Ici, irréprochable vu le mode de pêche. Tartare taillé gros qui offre aux dents le charnu et la sensualité de cette chair sublime, ponctué de cassis à peine mûr qui fera l'accord avec le vin, rouge et léger, fruité.
Saint Pierre de l'île d'Yeu, mousseline de chou fleur graffiti et gingembre, concombre et cassis, légumes au sautoir annoncé mais l'acompagnement était celui de l'agneau : mousseline de carotte, orange et safran, très bonne au demeurant. Et sans doute une purée de persil pour la couleur. Joliment cuisiné, un peu en deça du vin proposé qui est une "bombe".
Les vins en accord, très belle harmonie entre le thon rouge-cassis et le Morgon ; un peu trop exubérant pour le Saint Pierre, le Bourgogne "les Bigotes", explosif et long en bouche, très belle découverte pour toutes les deux.
Les légumes (et fruits) accompagnant nos plats : colorés et croquants, cuissons justes, de la saveur.
Cerises Rainier, en giboulée, infusée d'hibiscus et basilic pourpre, crème glacée à la pistache, éclats de pistache. La couleur des cerises est intrigante, je m'interroge sur la variété, sont-elles aigrelettes ? Rainier ressemble à Napoléon, grosse, charnue, sucrée, c'est l'infusion qui lui donne cette couleur plus claire. C'est un dessert gourmand, justement sucré et la pistache a la saveur des pistaches de Sicile...
Fraises des jardins de Morainvilliers, straciatella, hibiscus, huile d'olive infusée à l'huile essentielle de bigarade, crème glacée à l'oseille fraîche. Beaucoup de fraîcheur et dans ce dessert que vient souligner la glace à l'oseille. Inspirant...
Vraiment une excellente "Table" que je recommande, dans un coin du 12ème arrondissement de Paris qui regorge d'autres bonnes adresses mais j'en reparlerai... A noter que le pain au levain est fait maison, à base de farine de blés anciens de Roland Feuillas, et qu'il est divin.
Table
3, rue de Prague
75012 Paris
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