"Epater, bluffer", ce vocabulaire a tendance à être de plus en plus présent en cuisine, c'est vraiment énervant ! Selon les définitions, bluffer c'est tromper, faire illusion, se vanter, essayer d'en imposer aux autres, impressionner... Alors qui cherche à bluffer qui et pourquoi ? On entend ce verbiage insupportable à l'identique dans plusieurs univers différents : magazines, salons culinaires, blogueurs et même chefs de cuisine, sans parler des émissions de cuisine ccomme Top Chef (presque plus les jurés que les candidats finalement, du moins cette saison) ou Norbert et Jean, le défi !
Or, on a surtout envie de goûter des choses bonnes, bien cuites, bien assaisonnées, joliment dressées, pas trop compliquées mais qui procure une émotion, voire qui ont une histoire. Et avant tout à base de bons produits ! Dans la cuisine amateur ? C'est tout pareil ! Ce qui guide, ce n'est pas "l'épat'", c'est le plaisir, celui qu'on a à cuisiner, celui que les autres auront à déguster. Donner du plaisir. La cuisine est un acte d'amour, pas vrai ? (dixit Martin Berasategui, et il n'est pas le seul) On donne sans retour. La satisfaction, c'est que l'autre (le client, l'ami, le conjoint, les enfants, etc...) soit content parce qu'il a passé un bon moment et qu'il s'est régalé. Le reste c'est sans importance, sauf pour l'ego. Le bluff en cuisine me fait l'impression d'un pétard mouillé ou d'un soufflé dégonflé.
De l'autre côté, on peut évidemment être surpris, séduit par un plat, découvrir quelque chose de nouveau, un accord inattendu. Mais parler d'esbrouffe, de bluff pour la cuisine, il y a là une connotation négative détestable : avec ce vocabulaire, on est proche de l'entourloupe. Esbrouffe et consors, sortez des fourneaux ! Franchement je n'ai aucune envie d'être bluffée ou de bluffer qui que ce soit avec un plat. Juste envie de partager un bon moment de convivialité et de gourmandise avec une cuisine juste, équilibrée, bien faite, tout simplement. Comme ce midi à Cairanne entre sommeliers, vignerons, journalistes et blogueurs. Le monde vigneron est rélativement épargné d'ailleurs par ce langage. Aucun ne cherche à "bluffer" avec ses vins. Mais certains que le vigneron est heureux quand il sait que son vin plaît et qu'on a passé un agréable moment en le dégustant... reste bien des cuisiniers et des amateurs qui cuisinent pour ce même plaisir, celui de faire plaisir. Alors vive la cuisine pour la gourmandise !