Nous avons le même âge et il exerce dans "ma ville", en tout cas celle où j'ai presque toujours vécu de ma naissance à mon "exil" dans le Vaucluse, bref les trois quarts de ma vie ! C'est mon quatrième repas chez lui, j'en avais fait deux, tout au début, à l'ouverture de son restaurant, un autre il y a 5 ou 6 ans, et il y a une dizaine de jours, avec ma chère amie Caroline (avec qui j'y étais allée aussi précédemment). Lui, c'est Jean Chauvel et son restaurant, les Magnolias, dont il est propriétaire et chef de cuisine, est situé au Perreux sur Marne en région parisienne, non loin de Vincennes. Il s'est installé aux côtés de sa femme (charmante, un accueil très chaleureux), qui s'occupe notamment du service en salle, et s'est fait une réputation d'OVNI, celle d'un jeune chef un peu excentrique dans sa cuisine : il joue d'associations étonnantes, à l'occasion de design culinaire, et créait des appellations ludiques et à rallonge pour ses plats, tantôt fantastiques, tantôt poétiques, qui en agaçaient plus d'un, mais qui l'amusaient (et moi aussi !).
Depuis quelques temps, l'esprit du restaurant s'est recadré sur une cuisine de marché, avec des plats qui changent chaque semaine. Les intitulés sont de fait plus sobres, et diront certains, plus efficaces. Le chef met en valeur le produit, dans des associations toujours aussi surprenantes, mais il me semble que la créativité débridée a fait place à une inventivité plus "cadrée". Maturité ?
Il existe avec ses fournisseurs un respect et une fidélité comme, notamment, avec ce "ciseleur" de légumes, ce maraîcher-jardinier bio du Cher qu'est Arnaud Lasserre ou encore le plus médiatique Joël Thiebault. Mais pas que. Il fait la part belle également aux artisans d'art, tel le souffleur de verre Céline Coquart (Lazzaroni Verre) qui crée, sur-mesure, les contenants ludiques du restaurant.
Lors de ce dîner, mon amie Caroline m'a convaincue de prendre le menu "dégustation" au bout duquel je n'étais pas sûre d'arriver. Et grosse erreur, nous avons en plus commencé par du Champagne ! Les desserts n'ont sans doute pas été appréciés à leur juste valeur, et j'ai à peine bu le dernier verre de vin...
En amuse-bouche : à gauche, un consommé de canard et à droite, une cuillère de carottes toniques, acidulées et son haddock fondant (on déguste en sens inverse !)
Premier plat en duo, ci-dessus Foie gras de canard confit au piment doux d'Espelette, "ail - papaye" adoucis au tamarin accompagné de pourpier d'hiver. Du craquant, un peu d'amertume (le jus vert) et d'acidulé, entrée en matière remarquée ! Avec un bémol sur la papaye un peu "transparente".
Et, ci-dessous, un sublime velouté de chou-fleur et langoustine et sa paille de pomme de terre et foie gras, accompagné d'un Côte de Gascogne 2009 Domaine Chiroulet "La Côte d'Heux".
Puis, le premier plat de poisson, un excellent Maquereau de ligne de nos côtes poêlé au shiso rougi de "betterave - hibiscus", sucré-salé avec une pointe d'acidité, avec un Domaine Jean Fournier 2008 "Les champs Forey" qui ferait aimer le Bourgogne aligoté !
Puis, une langoustine et son guacamole-chorizo, pas mal sans plus (j'ai même oublié de photographier !)
Plus intéressant, les Saint-Jacques normandes nouées de patate douce aux parfums de "cédrat - mimolette" servi avec une vinaigrette passion, bel équilibre avec des saveurs inattendues mais complémentaires, très beau plat, un de mes favoris.
En duo avec la pétoncle d'Ethel au beurre safrané, plus classique et bon :
Le gadgetissime jambon-beurre à boire (comme chez Eric Fréchon), dans un contenant amusant qui rappelle un peu les pipes à opium. Comme pour la paille de foie gras et d'autres supports à venir, le chef travaille avec le souffleur de verre Céline Coquart qui les crée sur commande ! Cette "boisson" ludique offre réellement lea saveur du jambon-beurre, voire même du croque-monsieur, sa version chaude. Car le liquide arrive chaud et on râpe du pain toasté dessus.
La daurade royale aux agrumes accompagnée de sa tranche de butternut et d'une lamelle d'ail Aomori formaient un mariage harmonieux et d'une limpidité remarquable. Bon accord avec le vin.
Suivie d'une dégustation dont on ne ferait presque qu'une bouchée : un cube de risotto croustillant et son émulsion ananas, j'ai beaucoup aimé l'acidulé du fruit sur le croustillant-fondant du risotto au parmesan.
Avant de reprendre les hostilités, un "trou normand" à la façon de Jean Chauvel : jus de pomme verte au limoncello qui remplit bien son office. A nouveau un contenant insolite (qui me rappelle par trop les pipettes à médicament de mes filles).
La viande : canette de Chalans, chou confit, châtaigne, jus réglissé (désolée pour la photo), dégusté avec un vin de Pays de l'Hérault Domaine les Terrasses d'Elise 2008 cuvée XB. D'un premier abord décontertant par sa puissance aromatique, véritable explosion en bouche dominée par la réglisse avec un caractère presqu'animal ! Tanins fondus, notes de musc, rondeur et accord excellent avec le plat. Quant au plat, la cuisson du canard est parfaite, le jus concentré et j'adore surtout le chou mariné (presque lacto-fermenté), sur le dessus.
L'accompagnaient une purée de pomme de terre traditionnelle, délicieuse, et un macaron à la moutarde, totalement addictif.
Pas de photo, c'est dommage, à l'heure du fromage : le brie de Meaux à la main de Bouddha et sirop de Liège était épatant.
Vient le temps des desserts, et pour démarrer, un pousse-pousse au litchee, sorbet rafraichissant, histoire de faire "place nette" sur les papilles et in vivo ! Toujours un support du maître verrier...
Puis, un "classique" du restaurant, le Saint-Honoré à boire. Un peu redondant avec le jambon-beurre ; régressif mais j'adhère moins.
Le cube chocolat, "farci" de poire au safran, joli montage et les feuilles de chocolat sont parfaites. Dessert agréable.
D'autres gourmandises sucrées encore dont le Mont-blanc de mangue enseveli de lait d’amande givré de meringue à la fleur d’oranger (ci-dessous), la meringue, un peu trop grosse, en fait un dessert un peu trop sucré. Dommage, cela aurait pu être mon préféré.
En fin de repas, d'autres mignardises mais impossible d'en avaler une, je goûte juste la ludique barbe-à-papa à la menthe poivrée, appréciée !
Merci encore pour l'accueil qui nous a été réservé, merci pour la gentillesse de Madame Chauvel, d'autant que nous avons fait une fois de plus la fermeture (avec mon amie Caroline nous sommes un peu coutumières du fait car nous nous voyons peu souvent)
Les Magnolias
48 avenue de bry
94170 Le Perreux s/Marne
tél : 01 48 72 47 43(pour réserver et connaître la carte qui ne figure pas sur Internet)