En cette semaine du Nouvel An chinois, j'aurais pu jeter un oeil aux vins chinois qui ont le vent en poupe, mais j'aurais risqué de confondre le jurassien d'ici et la bière de là-bas, les deux se disant "vin jaune"... Non pas de chinoiseries, nous n'irons pas si loin.
En préambule, même si à deux pas, on fait du vin formidable, je suis loin d'être chauvine en la matière ; et de fait, n'étant dans le Vaucluse qu'une "pièce rapportée", quelle légitimité aurais-je à être chauvine ? Le locavorisme (comment dit-on pour la boisson ?) connaît certaines limites comme la curiosité, l'envie, la passion, et donc, le voyage...
Pour répondre à l'appel de Guillaume, l'amateur de Morgon (entre autres), je vous emmène en voyage chez les Héllènes, pour ce 42ème Vendredi du Vin. Mais en passant par Grenoble ! C'est en effet chez un bon caviste que furent dégotés deux bouteilles de bon vin grec qui firent oublier d'un trait (enfin façon de parler, nous ne les avons pas "sifflé" comme ça !), la mauvaise retsina bue quand j'étais jeune globe-trotter entre les îles blanches, la Crète et le Péloponnèse. Souvenirs émus néanmoins... Cette Grèce-là était celle où l'on dormait à la belle étoile, où l'on pêchait des oursins (quitte parfois à les pêcher avec les pieds, aïe), où l'on se gavait de salade grecque et de yaourt au miel, où l'on pouvait admirer le lever de soleil sur la plage, o l'on respirait des parfums de fleur d'oranger plongée dans les yeux dorés d'un beau prénommé Takis...
Mais aujourd'hui, il s'agit d'un voyage tout virtuel, deux bouteilles venues d'une Grèce que je ne connais pas, une terre de vignes que je n'ai pas vue jadis.
Suivez-moi, d'abord jusqu'en Macédoine, campagne verdoyante en climat continental, plus clémente que bon nombre d'autres régions de Grèce. Poursuivons au coeur d'un vignoble situé à 350 m d'altitude, sur des pentes ensoleillées, abritées des vents froids ; ici pousse le xinomavro, cépage rouge dit aussi "noir-acide" pour sa teinte profonde et sombre, presque noire, et son acidité. Il a donné ses lettres de noblesses à l'appellation Naoussa. Le Naoussa 2008 du domaine Boutari est un vin puissant, tannique, un caractère bien trempé mais aussi bien équilibré ; le vin est marqué par les fruits rouges mûrs, presque compotés, la bouche est ample, fruitée et épicée : un vin "sudiste" à qui on trouverait volontiers une parenté avec certains crus de Côtes-du-Rhône méridionales. A déguster sur l'agneau, voire le mouton (Hi, souvlaki !). je ne sais pas ce que vaut cette distinction mais la cave a été mise en valeur par l'European Winery of the year 2008...
La seconde bouteille grecque est un magnifique vin doux naturel du Nord du Péloponnèse, le Mavrodaphne de Patras Kourtaki ; le mavrodaphne signifie "laurier noir", le nom désigne à la fois le cépage, rouge, et l'appellation. Le mavrodaphné est ici assemblé avec du Korinthiaki, le raisin noir de Corinthe, qui donne des vins concentrés. J'éprouve autant de plaisir à le boire qu'à lme manger !
Le vin est d'un rouge tuilé, gourmand, avec un nez sur les fruits secs, des notes de caramel ; la bouche suit, riche, capiteuse, pleine, le vin est comme confit ; beaucoup de sucrosité mais de la fraîcheur aussi qui contrebalance et allège cette sensation un peu lourde. Raisins secs miellés, pruneaux, caramel, ce vin est un délice pour qui aime les vins de ce genre : une absolue gourmandise avec du chocolat !
Santé, cheers, στην υγειά σου (prononcez stin iyá sou) ! Kalispera ! Bonsoir (un des quelques mots de grec qui reste imprimé après une bonne vingtaine d'années loin de la Grèce !).