Il vous paraîtra étrange que mes Noëls d'enfant - là-bas on dit "Nouël"- aient été privés du sapin frais coupé, de ses fruits de sucre, de ses petites flammes. Mais ne m'en plaignez pas trop, notre nuit du vingt-quatre était quand même une nuit de célébration, à notre silencieuse manière.
Il était bien rare que Sido n'eût pas trouvé dans le jardin, vivaces, épanouies sous la neige, les fleurs de l'ellébore que nous appelons roses de Noël.
En bouquet au centre la table, leurs boutons clos, ovales, violentés par la chaleur du beau feu, s'ouvraient avec une saccade mécanique qui étonnait les chats et que je guettais comme eux.
Nous n'avions ni boudin noir, ni boudin blanc, ni dinde aux marrons, mais les marrons seulement, bouillis et rôtis, et le chef-d'oeuvre de Sido, un pudding blanc, clouté de trois espèces de raisins, Smyrne, Malaga, Corinthe, truffé de melon confit, de cédrat en lamelles, d'oranges en petits dés.
Puis, comme il nous était loisible de veiller, la fête se prolongeait en veillée calme, au chuchotement des journaux froissés, des pages tournées, du feu sur lequel nous jetions quelque élagage vert et une poignée de gros sel qui crépitait et flambait vert sur la braise.
Colette - Paris de ma fenêtre (clin d'oeil à quelques personnes qui seront sensibles à cette lecture et qui se reconnaîtront)
C'est sur ce texte de Colette que je vous souhaite un Joyeux Noël !
Johanna Helena Looisen - Nature morte au christmas pudding, houx et vin