Le sujet "jambon ibérique" est complexe mais j'ai souhaité éclaircir le sujet "jambon basque" dont il existe plusieurs références, plusieurs appellations, dénominations, labels... Qu'en est-il donc du jambon de Bayonne, de l'Ibaïona, du jambon des Aldudes, du Kintoa ?
En préambule, sachez tout d'abord qu'un porc "vieux" offre une chair plus goûteuse, une saveur plus "affirmée", et qu'il convient de sortir votre jambon environ une heure à l'avance et de le laisser à température ambiante jusqu'au moment du service. Il dévoilera ainsi sa palette gustative (on procède comme pour le vin, le fromage, etc...).
Le plus connu est assurément le jambon de Bayonne, marqué de la croix basque, le lauburu. Certifié depuis 1998 par une IGP (Indication Géographique Protégée ; une demande d'AOP est en cours...), ce jambon cru est produit sur le Bassin de l’Adour, composé du département des Pyrénées Atlantiques et des cantons limitrophes des Landes, du Gers et des Hautes Pyrénées, mais à partir de porcs blancs pouvant provenir de 3 régions (Aquitaine, Midi-Pyrénées, Poitou-Charentes et quelques départements limitrophes), soit 1500 éleveurs sur 22 départements du quart Sud-Ouest de la France (la zone du Label rouge porc fermier du Sud-Ouest) ; on dénombre 34 salaisonniers producteurs de l'IGP jambon de Bayonne. Le jambon est salé au sel du Bassin de l'Adour (Sallies de Béarn), il est séché et affiné durant une durée variable, la durée de fabrication moyenne est de 9 à 12 mois avec un minimum de 7 mois. Il représente aujourd'hui 20 % de la production française, avec 1 450 000 pièces par an (source l'Express-styles). A noter l'existence d'un jambon Label rouge spécifique sous le nom "Oberena".
Vanté par Rabelais dans son Gargantua, très apprécié par Henri IV, le jambon de Bayonne est issu d'une longue tradition fêté à la foire au jambon à Bayonne chaque année à Pâques depuis le XVème siècle ! A table, il offre une saveur fine, subtile, ronde en bouche et sa texture est fondante ; il peut être coupé fin, au couteau, s'il est mangé cru ou un peu plus épais s'il est poêlé pour être dégusté avec une piperade par exemple. Ajoutez un oeuf frit ou poché et vous avez un "petit déjeuner béarnais" !
Pour en savoir plus sur le Jambon de Bayonne, cliquez ici.
Créé il y a plus de 20 ans par une poignée de producteurs et d'éleveurs, le label jambon Ibaïona se veut supérieur au jambon de Bayonne (le prix en témoigne, moitié plus cher), et plus "local", jouant la carte 100% basque : le jambon provient exclusivement de porcs élevés au pays basque (jusqu'à 11 mois et 180 kilos minimum. Les porcs blancs sont élevés un an à base de céréales, en semi liberté). Il est affiné au sel de Salliès de Béarn et affiné en moyenne 15 à 21 mois, en séchoir à l'air libre, sans contrôle d'humidité ou de température : ses qualités gustatives sont dues au climat particulier et aux effets de foehn dans les Pyrénées, explique Eric Ospital. Aujourd'hui, 3 salaisonniers proposent de l'Ibaïona : Montauzer à Guiche, Mayté à Saint-Jean-le-Vieux, Montauzer et Ospital à Hasparren ; les trois salaisonniers travaillant aujourd'hui avec deux producteurs, l’un à Lasse (M. Guénard), l’autre à Baïgorry (M. Larre).
Le jambon Ibaïona est plus puissant en goût que le jambon de Bayonne, peu salé, long en bouche avec une saveur plus prononcée de noisette.
Le jambon des Aldudes est comme son nom l'indique produit dans la Vallée des Aldudes, au nord de la Basse Navarre au pays basque, entre Saint Etienne de Baïgorry et la frontière espagnole. 5 artisans dont l'éleveur-salaisonnier Pierre Oteiza, y sèchent leurs jambons de porcs blancs (élévés un an comme pour l'Ibaïona), dans un séchoir commun d'une capacité de 40 000 pièces. Il est affiné 10 à 14 mois et est donc un peu plus cher que le jambon de Bayonne, affinage lent, toujours au vent du Sud... A noter le gabarit des porcs : 120 kilos à 6 mois (équivalent au porc Label rouge du Sud Ouest utilisé pour le Jambon de Bayonne mais supérieur à la moyenne nationale de 90 kilos).
Le jambon des Aldudes est fondant, fin, aux arômes subtils (nb il peut être frotté au piment d'Espelette, ce qui lui donne une saveur un peu plus corsée).
Le jambon du Kintoa provient de la région du Quint (Kintoa en basque), située au sud des Aldudes ; il est produit uniquement à partir des porcs "Pie noire" (Euskal Xerria en basque, que l'on peut voir ici), race autochtone qui a bien failli disparaître sans la volonté tenace d'une poignée d'éleveurs dont Pierre Oteiza. Aujourd'hui, il y aurait près d'une centaine d'éleveurs de cochons basques élévés en plein air, nourris aux céréales et aux glands (notez aussi le nom de Christian Aguerre à Ixtassou). Comme pour l'Ibaïona, le jambon du Kintoa est séché naturellement : durant 7 mois, le séchage est contrôlé, puis jusqu'à 18 mois, le jambon sèche et s'affine à l'air libre, avec cette alternance particulière de vents chauds du sud et d'airs océaniques.
Comme l'Ibaïona, le jambon du Kintoa est parfumé, goûteux, tendre, à la saveur affirmée et aux notes de noisettes, de noix, et très long en bouche ; il est donc aussi plus cher que le Bayonne.
Désolée pour la piètre qualité de photo prise avec mon smartphone...
A noter encore, le jambon de montagne Urkulu de la maison Xingara, non testé mais signalé par Alain Darroze.