Vous connaissez sans doute ce très ancien fromage franc-comtois crémeux, hivernal, festif mais pas que : le "Mont d'Or" ou "Vacherin du Haut Doubs" (attention aux contrefaçons !) est une pâte molle non cuite à croûte lavée, produite à base de lait cru de vache Montbéliarde ou Simmental françaises exclusivement. Sa production s'échelonne du 15 août au 15 mars, sur une zone qui s'étend le long de la frontière suisse, entre la source et le saut du Doubs, à plus de 700 mètres d'altitude. Après démoulage, le caillé est cerclé dans l'épicéa et affiné 21 jours sur des planches d'épicéa. Les fromages sont retournés et lavés régulièrement à l'eau salée, puis se forme cette croûte rose ou blanchie, douce, formant les bosses et creux qui évoquent les reliefs montagneux de Franche-Comté... L'affinage se termine dans la boîte, toujours d'épicéa, le bois contribuant à la saveur délicieusement typée du fromage.
Alors, pas d'AOC sans sanglier ? Il n'est pas question ici du gibier mais d'une profession ! Le sanglier est celui qui lève les sangles d'épicéa qui cercleront le vacherin Mont d'or du Haut Doubs. Une fois que l'épicéa a été abattu par le bûcheron, le sanglier écorce le tronc à l'aide d'une "plumette" (ou pêle-tronc ou couteau à sangle), un outil terminé par une large et fine lame. Il prélève alors de longues lanières blanches sur toute la longueur de l'arbre, les sangles (dans la partie entre le tronc et l'écorce nommée liber) ; il les fait ensuite sécher et les enroule en paquets qui seront vendus aux fromagers (crédit photo simo).
D'une profession ancienne et régionale, il demeure une douzaine de bûcherons-sangliers, y compris des femmes ! Comme la jeune cousine du chef étoilé Marc Faivre par exemple, qui a repris l'exploitation familiale. Le métier a de l'avenir, car l'épicéa fait partie intégrante du Mont d'or, conférant cette saveur subtilement boisée... Pour autant, contrairement à la production de lait, la fabrication et l’affinage des fromages obligatoirement effectués dans l’aire géographique, l'AOC (décret du 17 mai 2006) ne précise pas la provenance des sangles, qui sont en partie importées. Plusieurs raisons à cela : certains sangliers exercent cette profession comme second métier d'appoint, et l'ensemble des sangliers du Haut-Doubs ne suffit pas à fournir suffisamment de sangles pour 4700 tonnes de fromage ! La profession doit se structurer pour pouvoir faire face à une telle demande... Pour autant, on peut légitimement se poser la question de savoir pourquoi historiquement, l'AOC n'a pas intégré l'origine franc-comtoise des sangles. D'autant qu'à l'époque, il ne se produisait que 466 tonnes de Mont d'Or, soit près de 10 fois moins qu'aujourd'hui !
Vous n'avez jamais mangé de Mont d'or sur les cîmes franc-comtoises ? Vous n'en avez jamais mangé ! J'exagère à peine... Saviez-vous que les jurassiens pur jus mangeaient aussi la croûte ? J'ai testé : sur un Mont d'or de très bonne qualité, la croûte est délicieuse, aussi.
J'adore le déguster à la cuillère, j'aime la version "boête" chaude et la fondue vaudoise, le mariage avec les noix fraîches, mais je le cuisine aussi !
Tarte feuilletée aux topinambours et au Mont d'or
Pain perdu au Mont d'or et au carvi
Veau, sauce crémeuse aux morilles, purée au Mont d'Or
Velouté de Mont d'or, topinambours, paillettes de truffe
Sandwich grillé jambon, céleri-rave et Mont d'or
Gros macaroni farci de topinambour, gratiné d'une Mornay au Mont d'or, émulsion de savagnin
Betterave et carotte gratinées au Mont d'or et à la sauge